Est-ce que le management existe ?
On constate ses effets, mais il est
tellement difficile à situer et surtout
à combattre, qu’on peut se demander s’il n’est pas une vue de l’esprit, par Guillermo Kozlowski
Non pas un corpus cohérent, une doctrine, des références et des référents, mais une myriade de dispositifs venus de nulle part, prônés par d’illustres inconnus, sombres tacherons, armés de leur présentation powerpoint et d’une foi inébranlable : voici le management. C’est tout et rien, tout parce qu’on retrouve ces dispositifs dans tous les domaines de notre vie : le travail, la santé, l’éducation, l’art, la politique, la science, le sport, la vie amoureuse, le temps libre. Rien, parce que chacun de ces minuscules dispositifs est indépendant et, en lui-même, insignifiant : une statistique en temps réel, un fichier qui centralise certaines informations, un agenda commun, l’évaluation de certains critères de « qualité », l’application d’une procédure standardisée pour accueillir le public, l’enregistrement de certaines données, la définition plus précise d’un poste de travail en termes de compétences, la nécessité d’une procédure écrite et normalisée pour chaque démarche...
L’emprise de la gestion, c’est cela ! En vingt ou trente ans, le pouvoir de décision a été transféré à des gestionnaires ou plutôt à des processus de gestion, de vérification de critères, dits « objectivables ». Par exemple, dans le travail social, les objectifs de fond sont devenus généraux : une éducation de qualité, la cohésion sociale, l’insertion socioprofessionnelle, c’est vague. Et parce qu’elles sont vagues, trop générales, ces questions ne suscitent plus aucun débat.
En revanche, les modes opératoires, les moyens et les modes d’évaluation quant au respect de ces procédés sont devenus fort précis, très concrets , réactifs, peu négociables... et effectivement, très rarement négociés. Chaque dispositif mis en place est tellement particulier, qu’aucun ne semble pas non plus, mériter un vrai débat.
Quel est le problème ? Un peu partout, dans le travail social, on constate que lorsque les processus de gestion s’imposent comme critère de décision, l’efficacité dans l’action diminue, ou plutôt elle change de nature. C’est-à-dire que concrètement, lorsque le management s’applique, le travail se modifie, il devient autre chose. Le problème est que cette « autre chose » n’est pas questionnée. Elle est simplement évaluée... avec les critères du management.
Une précision néanmoins ! Notre intention n’est pas de dénoncer l’humain broyé par d’immondes machinations aux intérêts innommables. Tout cela resterait aussi beaucoup trop vague. Et, il s’agit encore moins de la nostalgie du bon vieux temps où les choses se passaient autrement, rien en effet ne nous interdit de regarder l’histoire, mais la question est bien ce qu’on peut faire, ici et maintenant.
Est-ce que le management existe ? Cette question est soulevée dès que l’on s’apprête à penser ces évolutions et les dispositifs hétéroclites qui le composent. Le management présente-t-il une unité ou est-il simplement une superposition d’éléments indépendants ? Chercher dans le management une politique coordonnée, centralisée, cohérente, est une impasse. Certes, y parvenir simplifierait les choses, au sens propre du terme : plutôt qu’une myriade de dispositifs, on trouverait un cabinet secret. Mais il est difficile de croire qu’un cabinet secret, caché quelque part, dicte aux responsables d’une petite ONG bruxelloise de mettre en place volontairement une « démarche qualité ». Il est aussi incongru d’avancer que tous ces dispositifs, qui s’emboîtent aussi bien entre eux, n’ont rien en commun.
Peut-être, dès lors, pourrait-on y chercher une sorte d’unité de fonctionnement qui rend possible cet agencement ? Par exemple : il faut des fichiers centralisés pour que certains types d’évaluation soient possibles. Ainsi, le découpage de l’éducation en socles de compétences prend un sens particulier dès lors que ce type d’évaluation et ces fichiers existent. Et, inversement, un fichier a des nouvelles fonctionnalités lorsqu’il sert à comparer des compétences standardisées... Bien entendu, chaque élément existe indépendamment. Ils sont issus souvent de domaines très hétéroclites, ils présentent des histoires différentes, mais en même temps ils s’amplifient entre eux, interagissent et provoquent des évolutions.
En quoi, alors, toutes ces démarches s’accordent-elles ? Peut-être en ceci : découper toutes les actions en gestes basiques et mesurer chacun en termes de coût et de profit. Dans le cadre d’une entreprise, mais aussi - pourquoi pas ? - dans celui d’une relation amoureuse ou de l’éducation des enfants ou d’un hobby. Pas besoin d’être un grand PDG pour gérer quelque chose. On peut très bien « gérer » sa soirée du samedi soir. Se poser donc cette question, faire la balance : « Qu’est ce que ça me rapporte ? » Qu’est-ce que ça me rapporte d’aller au cinéma, qu’est-ce que cela me coûte ? Lister les éléments qui composent cette sortie du samedi soir, les évaluer un par un. Une philosophie entière, l’utilitarisme, s’est construite autour de cette question, tout un mode de vie.
Le postulat est le suivant : il y a une manière rationnelle de faire les choses, une manière objective et qui relève de la technique. Une manière qui se débarrasse de tous les récits, renvoyés au rang des superstitions, et qui propose d’enlever tout un tas de gestes inutiles, qui polluent les gestes vraiment rentables. La gestion s’occupe de découper ces gestes de base, puis de les rationaliser. Tous les dispositifs gestionnaires ont cela en commun. Toujours la même question, dans toutes les situations ; qu’est-ce qui est utile dans une consultation médicale ? Ou dans un cours au lycée ? Dans une formation professionnelle ? Comment déterminer les unités de base, celles dont on peut évaluer l’utilité ? Comment réduire quelque chose a une série d’informations, transmissibles, compréhensibles et valables partout et pour tous ? La question du gestionnaire tient en ceci : une fois obtenu l’atome du geste utile, on pourrait enlever le reste et bâtir un monde rationnel.
Lorsqu’il débarque, le premier geste de l’humble serviteur de la cause de la gestion est d’expliquer qu’un groupe ne fait pas les choses de manière rationnelle et donc, qu’il perd du temps. Le constat est en général ahurissant... Sans se gratter la tête pour réfléchir, mais en commençant directement à écrire, le chargé d’étude gagnerait tant de secondes par jour, tant de minutes par mois, tant d’heures sur une année. Et si nos agendas étaient centralisés ? Et si la machine à café était utilisée ou placée différemment... Bah. C’est peut être une caricature. Quoique...
Imaginez que nous en arrivions à penser en ces termes tous nos gestes, nous disent-ils d’un ton rêveur. Imaginez un système qui parvient à placer chaque chômeur dans la bonne case, à la bonne place. Vous rendez-vous compte du temps gagné ? Et surtout le temps perdu évité ? À quel point il serait facile de le retrouver par après ! Réussir faciliterait grandement la procédure au conseiller X qui doit reprendre le dossier ! Et si lors des entretiens, les questions sont écrites de telle manière que votre public ne puisse y répondre que par oui ou par un non. Imaginez encore le gain de temps ! Mais le clou de la démonstration est toujours celui-ci : Et si toutes ces données étaient centralisées ? Alors là...
Peu à peu, les gestionnaires espèrent l’instauration de fondations communes à tous. En ce sens, l’approche par compétences est exemplaire. Elle est une cristallisation importante de tous ces processus. Les compétences se présentent comme valables partout et pour tous : au travail, à l’école, dans la santé, ou dans la vie privée (c’est dans des termes proches des compétences qu’on se décrit soi-même dans beaucoup de réseaux sociaux). Elles sont censées être à la fois des éléments de base naturels des êtres humains, et des capacités qu’on peut acquérir, gestes de base de tous nos actes, elles sont évaluables, descriptibles, universelles, peuvent être pensées comme un capital humain, on peut les acheter, les vendre, les rentabiliser, elles permettent un traitement statistique facile et constituent des informations faciles à échanger.
Gagner, avec la gestion, on ne fait, semble-t-il, que gagner ! Agir pareillement, mais, en mieux...
La gestion fait tout pour produire des résultats merveilleux et pourtant elle en a rarement créé. Partout où il arrive, le néo-management engendre une très forte violence, pour le public, et les travailleurs ; et paradoxalement, de l’inefficacité.
Les premiers éléments à disparaître sont ceux que le gestionnaire juge inutiles d’après sa conception du monde. Mais les travailleurs partagent, eux aussi, souvent l’idée que le management est efficace. En effet, comment expliquer le gain d’efficacité à « perdre » dix minutes pour rejoindre la machine à café situé de l’autre côté du bâtiment ? On peut toujours raconter des histoires. Mais, ils auront du mal à vraiment se justifier. On pressent perdre quelque chose, mais, c’est difficile à défendre. Et il est encore plus difficile d’expliquer en quoi est-ce profitable de ne pas disposer de toute la vie d’une personne sur son écran ? Comme le propose par exemple le fichier RPE qui centralise les informations de tous les opérateurs de l’insertion socio-professionnelle. Difficile de dire pourquoi l’application d’une démarche qualité dans les ONG pose problème. Ça fait gagner du temps, non ? C’est très pratique. N’est-ce pas ? C’est plus efficace... Bien entendu, il faudra faire très attention aux dérives possibles. Mais, promis, « si on franchit la ligne rouge, alors on réagira ! », répètent de concert toutes sortes de bonnes consciences.
Ces fameux critères objectivables deviennent peu à peu des objectifs en soi. On confond indicateurs et la réalité. Les indicateurs sont interprétés comme des signes que la réalité nous fait, voire comme la réalité elle-même. Combien de compétences avez-vous apprises à combien de gens ? Il faut bien savoir si ce qu’on fait sert à quelque chose... N’est-ce pas ? En bref, puisque c’est d’après les indicateurs qu’on est évalué, alors les indicateurs deviennent l’objectif. Un exemple insignifiant parmi d’autres : le fichier RPE sert à « s’occuper » des chômeurs en formation, mais aussi des travailleurs sociaux. Parmi les données qu’il produit, il y a aussi le nombre d’encodages de chaque opérateur (ou de chaque travailleur individuellement). Dans certaines missions locales, il est devenu courant d’encoder des modifications variées, juste pour faire du chiffre. Ce n’est rien, et en même temps, n’est-ce pas rentrer dans une certaine logique ? Souvent, l’employé sait très bien qu’il s’est fait piéger, que ce n’est pas si simple... Mais, en attendant, il est piégé.
Avant des pistes pour échapper au piège, il faut regarder les sorties de route qu’on n’arrête pas d’emprunter et qui mènent sans cesse à des impasses. Tout d’abord, la question n’est pas de retrouver l’humain, parce que retrouver l’humain suppose qu’on définisse ce qu’on entend par humain. L’humain c’est le sourire ? OK, chez McDonald’s, le personnel sourit. L’humain, c’est parler ! OK, alors, chaque vendredi midi, l’équipe mange ensemble : repas de convivialité Et gare à celui qui ne blague pas pendant le repas ! Ou alors, l’humain, c’est l’appât du gain... Et on instaure des primes au mérite. Ou l’humain c’est prendre dix minutes pour la pause-café en rejoignant l’autre côté du bâtiment.
Par une sorte de tour de passe-passe, un nouveau domaine à gérer naît de chaque critique de la gestion au nom de l’humain. Maintenant, le vendredi, l’équipe devra manger ensemble et chacun devra gérer son temps, mais, aussi, et surtout, son état d’esprit. Pas question d’être morose à la « réunion convivialité ». Il faut gérer ses nerfs, son stress, ses problèmes pour qu’ils n’apparaissent pas à ce moment-là. Et si on avance qu’il faut des moments pour cela aussi, alors le manager invente de nouvelles techniques pour apprendre à mieux se gérer, etc. Ou alors, ces sentiments seront considérés comme des exagérations, ou plutôt, des signes de faiblesse.
La question n’est pas de revenir aux vraies valeurs qu’on aurait perdues, quelque part, par mégarde. Revenir en arrière est impossible. Les situations sont des agencements complexes, chaque élément n’est possible que parce que tous les autres sont là. Il n’y a pas un élément qu’on pourrait changer ici où là, après une franche réunion d’équipe. Une sortie me semble-t-il, devrait justement passer par la prise en charge de cette complexité. Complexité qui est évacuée du management dans la recherche de critères objectivables. Cette complexité est en revanche pensable dans notre expérience. Retrouver la complexité pour retrouver une capacité d’action.
Prenons un exemple le plus éloigné possible de la vie de l’entreprise. Dans Par-delà nature et culture, Philippe Descola rapporte que les chasseurs Achuar (Amazonie, Équateur) ne sont considérés comme performants – ils le sont effectivement dans leurs prises – qu’après 35 ans. Or, dès l’adolescence, ils connaissent déjà la plupart des informations nécessaires et sont déjà très habiles avec leurs armes. D’où cette question : « qu’apprend-il au juste qui puisse faire la différence ? ». Pour Descola, « l’essentiel de son acquis consiste probablement en une aptitude de mieux en mieux maîtriser ; à interconnecter une foule d’informations hétérogènes qui se structurent de telle façon qu’elles permettent une réponse efficace et immédiate à n’importe quel type de situation rencontrée... Sur la nature de cette expertise, dont seul l’effet est mesurable, un non-chasseur en reste réduit aux conjectures, car presque rien de tout cela ne peut être exprimé de façon adéquate par le langage ».
La question n’est pas de proposer l’exotisme comme solution, ni une sorte de retour à la nature, ni rien de ce genre. Le choix de cet exemple, plutôt que beaucoup d’autres possibles, est plutôt un clin d’œil, un peu d’interculturel à l’envers peut-être. Quoi qu’il en soit, nous vous proposons de regarder de plus près l’analyse de l’anthropologue. Étant donné que les situations dans lesquelles nous vivons sont complexes, il n’est possible d’y agir que parce que nous avons une certaine expérience. C’est-à-dire parce que nous agissons déjà dans la complexité. C’est-à-dire que nous prenons en compte beaucoup plus de données que celles dont nous sommes conscients. Penser uniquement en termes manageriaux, revient à isoler certains moments qui nous semblent indispensables, et postuler, d’une manière magique, que seulement ces moments ont une efficacité. L’instant où l’on donne la pilule au patient, celui dans lequel on transmet une information à un élève, celui où on demande une information à un chômeur, celui dans lequel on lâche sa flèche. Comme si cet instant pouvait exister totalement délié du reste. Et surtout, comme si tout ce qui est « autour », de cet instant n’avait aucune efficacité.
Nul besoin d’aller en Amazonie, le principe de la conduite automobile est aussi celui-là. Avec l’expérience, on réussit à intégrer un très grand nombre de paramètres qu’on ne pourrait pas gérer au niveau de la conscience. Au début, lorsqu’il apprend à conduire, le conducteur doit en effet réfléchir geste par geste. Du coup, il n’arrive pas à conduire. Marcher est plus complexe que conduire une automobile (et moins dangereux !) , il faut notamment calculer l’équilibre en permanence. Essayez de marcher en découpant la marche en gestes de base et de réfléchir en même temps au geste qu’il faut réaliser !
La force du management, toutes ces techniques, dispositifs, manières de faire qui s’agglomèrent de manière plus ou moins stable, tient dans ce qu’elles donnent l’impression d’une prise sur le monde. Le monde nous semble terriblement confus. Or, avec cette nébuleuse de démarches qu’on appelle management, on obtient des petits gestes maîtrisables, évaluables, prévisibles. C’est en cela que ce mouvement paraît une évidence pour beaucoup et un mal nécessaire pour d’autres.
Pourtant, la prise sur le monde qu’offre le management n’est qu’une illusion. Si le management retrouve des atomes de base, c’est simplement qu’il ne regarde que ce qu’il veut. Dans sa description des chasseurs amazoniens, Descola qui, lui, pense en termes d’expérience et de complexité, affirme qu’en conséquence, une partie des récits de chasse « ne peut être exprimée en aucun langage ». Les partisans du management ont érigé comme une des compétences les plus universelles : « prendre la parole en public ». Mais, prendre la parole en public est une chose très différente selon la situation, le contexte !
Le management est une technique de pouvoir. Sa véritable efficacité est de rendre les gens plus obéissants. Sa vérité profonde est celle-ci, elle n’offre aucune prise sur le monde. Plus la nébuleuse de démarches qui le compose s’agence, et moins on regarde le monde. Ce sur quoi le management a une véritable prise est sur l’homme. Couper les gens de leur expérience, c’est les empêcher de penser, d’agir dans les situations concrètes où ils se trouvent.
Lorsqu’on détient toutes les données « utiles » sur un chômeur dans son ordinateur ; c’est-à-dire ses études, le détail des formations qu’il a suivi, son parcours professionnel, sa situation familiale..., on constitue un chômeur comme étant toutes ces données, et on demande à celui qui est dans cette case de suivre un parcours adéquat, signer le contrat qui lui correspond. Ces fichiers ne sont pas une manière de regarder, mais de constituer un chômeur et un travailleur social. Car si le chômeur doit suivre un certain parcours, l’assistant social doit apprendre à avoir ce regard particulier sur celui qu’il rencontre. Ensuite, en effet, le chômeur ou le travailleur social, constitués de cette manière, sont plus faciles à gérer. C’est la moindre des choses, parce que la procédure a été mis au point expressément pour cela. Le management ne vérifie pas des critères, il se fabrique-là un objet de pouvoir : le chômeur, mais aussi le travailleur social. Il faut réduire le chômeur à quelques critères normalisés, pour pouvoir exiger ensuite qu’il se plie à un parcours standardisé. Et c’est la même chose pour les travailleurs évalués en termes de compétences.
D’autre part, c’est peut-être là l’essentiel pour se dégager un peu de l’emprise du management : vivre dans un monde complexe n’empêche pas d’agir. Au lieu de regarder toutes ces informations isolées et atemporelles, nous pourrions, par exemple, commencer par nous intéresser aux expériences dans lesquelles se démènent ces chômeurs, ces assistants sociaux. Il ne s’agit pas de faire une confiance aveugle à la spontanéité créatrice des gens ou des choses de cet ordre. Tirer un savoir de son expérience n’est pas simple, c’est un vrai travail, mais pour commencer, il faudrait déjà arrêter de le dévaloriser.
Chômeurs et assistants sociaux savent qu’il n’y a pas de travail pour tout le monde... qu’on demande au travailleur social de faire pression pour flexibiliser le marché de l’emploi, ou précariser le marché de l’emploi ; ce qui revient au même. Ils ont aussi une expérience, et donc un savoir, sur les emplois précarisés, sur la pression de l’État social actif. Ils savent concrètement comment cela se passe, c’est là qu’il y a un véritable savoir à produire. Non pas juste témoigner, mais vraiment penser, élaborer des hypothèses, les confronter à des savoir académiques, les expérimenter dans des pratiques de résistance. Alors, dès qu’on se met à penser en termes de processus, et non d’indicateurs isolés, des conflits sont possibles. Ils émergent non pas sous la forme d’affrontements barbares, d’une lutte de tous contre tous – ce que nous vivons aujourd’hui, mais comme conflits susceptibles de créer du sens. Pas forcement une rupture radicale, mais la possibilité de renvoyer des savoirs depuis le terrain, d’avoir d’autres types de savoirs valables, d’ouvrir sur d’autres pratiques. Comme le dit Michel Foucault : « Il ne s’agit pas d’affranchir la vérité de tout système de pouvoir- ce qui serait une chimère puisque la vérité est elle même pouvoir-, mais de détacher le pouvoir de la vérité des formes d’hégémonie (sociales, économiques, culturelles) à l’intérieur desquelles pour l’instant elle fonctionne ».