Ce numéro s’ouvre par un article de Julia Petri et Chafik Allal qui présente la thématique du fétichisme numérique. Les deux auteurs nous proposent un avis sur cette numérisation de masse et se questionnent : l’homo sapiens deviendra-t-il homo- informaticus ? Ils abordent la place de la formation dans ce contexte de crise et de multiplication des outils digitaux. Ils s’interrogent aussi sur le sens du travail et l’emprise des outils numériques. Ils situent la place de l’éducation populaire dans ce domaine. Ces réflexions nous font part du fossé qui ne cesse de se creuser entre la pédagogie et le numérique. Ils nous rappellent enfin que ce sont surtout les pédagogies actives et collectives qui nous poussent aux bons questionnements.
La rédaction d’Antipodes est partie à la rencontre de Mara Coppens pour aborder le sujet de la digitalisation dans l’éducation à la citoyenneté mondiale et solidaire. Elle part du constat que la digitalisation est présente partout et que son expansion est de plus en plus prégnante. De nombreux questionnements s’appuient sur le pouvoir du numérique auprès d’un public plus jeune. Serait-ce la clé pour intéresser, informer et instruire la génération Z et les suivantes ? S’agirait-il de nouvelles méthodes pédagogiques complémentaires à celles déjà utilisées ? Ces questionnements nous invitent à réfléchir à l’évolution des méthodes et des instruments utilisés dans l’éducation à la citoyenneté solidaire.
Vincent Stevaux nous propose un voyage en Bolivie. Il rencontre Gabriel Alejandro Iriarte Rico, professeur de pensée critique. Son témoignage rend compte de l’accélération de l’utilisation des outils numériques due au confinement. Comme partout dans le monde, le digital s’est imposé et développé en Bolivie, mais des inégalités subsistent. Ce professeur nous invite donc à la réflexion individuelle sur ce sujet et ajoute : « C’est un énorme travail parce qu’on va vers cette culture du « like » facile des réseaux sociaux, et on s’enferme de plus en plus dans des discours simplistes, ce qui est extrêmement dangereux. »
Jean-Sébastien Philippart avait fait part, dans un texte qu’il avait écrit par ailleurs, de son point de vue critique sur « l’enseignement hybride ». Cet enseignement à distance est pour lui un non-sens pour l’être humain. Il y parle de sensibilité, de pédagogie, d’échanges... Chafik Allal et Julia Petri ont été inspirés par ce texte et ont alors travaillé avec lui pour tenter de voir comment les mêmes questions pouvaient se poser en éducation populaire et en formation pour adultes. Le résultat est riche en « poélitique », mélange de poétique et de politique.
S’en suit un récit poignant de Tito Dupret. Il nous raconte les coulisses de son métier d’enseignant : les difficultés à garder la tête hors de l’eau, les interactions entre élèves et le changement dû au post-confinement. Il propose une introspection sur la présence de l’absence « Nous sommes présents sur cette Terre, mais je pense en fait que nous en sommes déjà absents. » Ce thème est abordé de telle manière qu’il donne envie de penser le monde différemment et d’interagir plus avec celui-ci.
Joris De Beer apporte le point de vue intéressant d’un professeur bruxellois : méthodes d’enseignement, conséquences de la crise sur nos apprentissages et, avec les inégalités qui se creusent, différentes manières de penser le monde. Un témoignage qui nous plonge dans la réalité du pouvoir du digital en milieu scolaire et qui nous incite à nous questionner sur les choix gouvernementaux, l’avenir de nos métiers ainsi que les impacts environnementaux et sociaux.
Olivier de Halleux clôture ce numéro par un article qui poursuit la réflexion sur la nécessité de se former à l’analyse critique des médias. Une interview réalisée avec Média animation, référence dans le domaine de la formation aux médias, nous invite à découvrir l’utilisation des réseaux sociaux par la jeunesse, ainsi que la créativité qui s’en dégage dans ses aspects positifs ou négatifs. Nous percevons également diverses réflexions sur notre appropriation de contenus numériques et sur le phénomène d’« ubérisation ».
Bonne Lecture !
« Si, en effet, Internet a beaucoup à offrir à qui sait ce qu’il cherche, le même Internet est tout aussi capable de compléter l’abrutissement de ceux et celles qui y naviguent sans boussole. »
Laurent Laplante
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