Pauvre, vagabond, sous-prolétaire, exclu, SDF ?..., un quiz proposé par Abraham Franssen
Loin d’être une catégorie « naturelle », s’imposant d’elle-même comme simple reflet d’une réalité sociale objective, la « pauvreté » résulte avant tout d’un processus de construction et de catégorisation politique, sociale et culturelle.
C’est à la définition et au traitement de ses marges que l’on peut le mieux reconnaître les logiques sociales et culturelles dominantes d’une société. Par l’aumône faite à une pauvreté sacralisée, la société moyenâgeuse affirmait la prédominance d’une vision religieuse par laquelle elle justifiait son ordre social et symbolique. En enfermant les vagabonds, la société moderne émergente (à partir de la fin du 17ème et au 18ème siècle) prétendait les discipliner et leur inculquer une morale du travail. L’irruption de la « question sociale » à la fin du 19ème siècle a explicité l’exploitation des masses laborieuses dans la société industrielle.
Ce qui se trouve chaque fois en jeu, dans la production sociale et culturelle de la marginalité et dans le type de traitement qui lui est réservé, c’est bien le type de légitimation et la nature des rapports sociaux d’une société. Quand bien même on prétend les objectiver au travers de la production d’indicateurs, de statistiques, de concepts, et au travers même de ce processus de construction de catégories descriptives, la pauvreté, la marginalité, l’exclusion, la délinquance, la folie, la maladie ne sont pas des notions objectives, mais consistent d’abord en un rapport social qui évolue dans le temps.
Derrière les figures successives du pauvre, du vagabond, du sous-prolétaire, de l’« exclu », du « SDF », on retrouve chaque fois l’imaginaire d’une société (son « modèle culturel »), le type d’intégration qu’elle promeut et le poids des rapports de domination (« rapports de classe ») qui conduisent à désigner les catégories sociales considérées comme marginales, déficientes, déviantes, pathologiques. La catégorisation et le traitement de la pauvreté mettent toujours en oeuvre les images historiques du sujet, les jugements normatifs et les rapports entre groupes sociaux propres à chaque époque historique, distinguant chaque fois de manière renouvelée « bons » et « mauvais » pauvres.
A - Laurette Onkelinx
B - Maurice Bekaert
C - Louis XIV
D - Etienne Davignon
A- Nicolas Sarkozy
B - Dominique de Villepin
C - Le règlement communal de la ville de Bruxelles
D - L’ordonnance municipale de Moulin
A - Un demandeur d’emploi dans le cadre du plan d’accompagnement des chômeurs
B - Benoît XVI
C - Un demandeur d’aide sociale, dans le cadre du contrat d’intégration
D - Un serf, dans cadre d’un serment d’allégeance
A - Georges Bush
B - Edouard III d’Angleterre
C - Franck Vandebroucke
D - Albert II de Belgique
A - L’abbé Pierre
B - Philippe Van Parys, partisan de l’allocation universelle
C - Le Comité pour l’extinction de la mendicité de l’Assemblée Constituante, Révolution française, 1789
D - La déclaration du forum altermondialiste de Porto Alegre
A - Tony Blair
B - Guy Verhofstadt
C - Déclaration commune de la FGTB et de la CSC
D - Déclaration du sommet européen de Lisbonne.
1 - Il s’agit de Maurice Bekaert,
De l’assistance par le travail, Gand, Imprimerie Schiffer, 1895.
2 - Il s’agit de l’ Article 73 de
l’ordonnance de Moulin, février 1556, France, « Mise en place d’une nouvelle politique sociale municipale », cité par Robert Castel, dans Métamorphoses de la question sociale.
3 - Il s’agit d’un serment d’allé-geance au 8ème siècle (cité in R. Boutruche, Seigneurerie et féodalité, le premier âge des relations d’homme à homme).
4- Il s’agit d’Edouard III d’Angleterre, 1349, Ordonnance « Statut des travailleurs ».
5 - Il s’agit d’un extrait des Procès verbaux du Comité pour l’extinction de la mendicité de l’Assemblée Constituante de la Révolution française, 1789.
6 - Guy Verhofstadt, Accord de
gouvernement fédéral du 14 juillet 1999, « La voie vers le 21ème siècle ».
Plusieurs de ces citations sont extraites de l’ouvrage magistral de Robert Castel, Métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Paris, Fayard, 1995, également disponible en livre de poche.